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Actualités mai 2021 : Attention de bien notifier en cas de recours à un appel d’offres, la date de fin de préavis pour éviter l’écueil de la rupture brutale d’une relation commerciale établie.

Actualités mai 2021 : Attention de bien notifier en cas de recours à un appel d’offres, la date de fin de préavis pour éviter l’écueil de la rupture brutale d’une relation commerciale établie.

Rappel : Selon l’article L.442-1 - II du Code de commerce (ancien article L 442-6, I, 5°) : “Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, en l'absence d'un préavis écrit qui tienne compte notamment de la durée de la relation commerciale, en référence aux usages du commerce ou aux accords interprofessionnels (…) ».

S’il est acquis que le recours systématique à l’appel d’offres caractérise la précarité d’une relation (faisant obstacle à la qualification de relation commerciale établie – voir encore dernièrement l’arrêt du 15 avril 2021 commenté dans nos Actualités avril 2021), l’annonce du recours à l’appel d’offres, mettant fin à une relation commerciale établie, doit répondre à un certain formalisme, pour éviter de voir mise en cause sa responsabilité pour rupture brutale des relations commerciales établies. C’est ce que rappelle, à toutes fins utiles, l’arrêt de la chambre commerciale de la Cour de cassation du 27 mai 2021.

Ce qu’il faut retenir : Aux termes de cet arrêt, le recours à l’appel d’offres n’exempte pas la partie qui le lance de notifier en amont à son partenaire la date de cessation de la relation commerciale établie dans l’hypothèse où sa candidature ne serait pas retenue.

  • Cour de cassation, Chambre commerciale, 27 mai 2021, n°19-18.301, Inédit
    La société Mr Bricolage entretenait depuis 17 ans une relation commerciale avec la société Tôleries du Sud Ouest (dite “TSO”). Les parties avaient signé début 2013 un contrat cadre de commercialisation de produits d’une durée indéterminée prévoyant qu’il pourra être mis fin au contrat moyennant un préavis de 9 mois pour les relations commerciales d’une durée de plus de 10 ans.

Le 27 mai 2013, la société Mr Bricolage a manifesté par écrit son intention de ne pas poursuivre les relations contractuelles avec TSO dans les conditions antérieures, en ayant recours à la procédure d’appel d’offres pour 2014. Les relations commerciales ont alors pris fin le 10 septembre 2015, après que la société Mr Bricolage a accordé un préavis supplémentaire à TSO. Toutefois, TSO, se considérant victime d’une rupture brutale de la relation commerciale établie de 17 ans, a estimé que le préavis accordé par Mr Bricolage n’avait pas été suffisant pour lui permettre de redéployer son activité.


La Cour d’appel de Paris (Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 4, 27 mars 2019, n° 16/21943) a jugé que le délai de préavis avait commencé à courir le 27 mai 2013, soit le jour où Mr Bricolage a informé la société TSO du lancement de l’appel d’offres. Compte tenu de la durée des relations entretenues et du temps nécessaire pour permettre à TSO de redéployer son activité en trouvant d’autres débouchés, la Cour d’appel a décidé de fixer la durée du préavis à 12 mois, expirant donc le 27 mai 2014. Par conséquent, les juges du fond ont établi que la rupture ne présentait donc pas un caractère brutal, ni abusif ; TSO ayant, en pratique, bénéficié d’un préavis plus long dans la mesure où la relation avait effectivement pris fin le 10 septembre 2015.

La Cour de cassation casse l’arrêt de la Cour d’appel de Paris, considérant que la notification du 27 mai 2013 – qui se contentait d’annoncer le recours à l’appel d’offres – ne pouvait tenir lieu de notification de fin de relation commerciale, faute d’indiquer précisément la date effective de fin de préavis. En conséquence, sans cette mention, le délai de préavis ne pouvait débuter qu’à compter de la date à laquelle le partenaire s’est vu notifier le rejet de sa candidature (ce qui a pour effet de décaler d’autant la fin effective de la relation).

Quels enseignements, en pratique ?

Lorsque l’annonce du lancement de l’appel d’offres a également pour objet de notifier la résiliation de la relation commerciale établie, il est important de mentionner par écrit, dans ce courrier, la durée du préavis envisagé et la fin effective du préavis (dans le cas où la candidature du partenaire ne serait pas retenue) ; à défaut, la notification de lancement de l’appel d’offres ne pourra tenir lieu de courrier de résiliation répondant aux formes requises par l’article L.442-1-II du code de commerce.   

Sarah Temple-Boyer                                                                Ambre Boyer

Avocat                                                                                     Stagiaire

 

Publié le 06/07/2021